Le Catholique africain et les prophètes de décembre

Le mois de décembre est devenu un moment de panique et d’angoisse dans les foyers avec des prophéties qui créent un climat de peur. Dans ce balbutiement j’aimerais offrir des pistes aux Catholiques africains pour vivre sereinement le mois de décembre.

Au niveau sociologique

Dans nos villages en Afrique, la fin d’année est considérée comme le temps d’action par excellence des sorciers. C’est le moment où ils font les sacrifices, c’est le moment où ils font des évaluations en vue de réclamer des dettes aux chefs de famille pour l’offrande de tel ou tel fils. Du coup, les féticheurs, charlatans sont sollicités par des familles pour des protections spéciales. Les parents offrent des sacrifices colossaux parce que tel ou tel cadre est dans les filets des sorciers.

Au niveau psychologique

Cet environnement a impacté la psychologie générale et individuelle de nos populations en créant un climat de peur. À partir du 1er décembre, les populations vivent dans les questionnements : Comment sera la fin d’année ? Est-ce que nous verrons le Nouvel An ? Comment faire pour finir bien l’année ? Tel accident n’est-il pas un signe des actions des sorciers ?

Au niveau spirituel

L’environnement sociétal de la fin d’année et la psychologie générale qui en découle ont été déplacés dans le christianisme. A l’instar de nos parents non chrétiens, aujourd’hui les filles et fils chrétiens se posent les mêmes questions à l’approche de la fin d’année ce qui est tout à fait normal puisque l’Église est dans le monde et dans une société donnée avec son atmosphère. L’on a transposé ce paganisme dans l’Eglise. D’un côté nous avons certains pasteurs et responsables de groupes et communautés qui agissent comme les féticheurs de nos villages.

D’un autre côté, nous avons beaucoup de fidèles, même devenus chrétiens qui ont encore une mentalité païenne. Nous avons donc beaucoup d’Africains chrétiens de nom mais païens dans la pratique.
Face aux angoisses et interrogations des fidèles, les groupes pentecôtistes et évangéliques vont tenter de donner une réponse en instaurant à partir de leur doctrine des temps de jeûnes, de prière avec des dîmes et offrandes sacrificielles pour ouvrir l’année. Ces espaces à travers lesquels les prophètes, visionnaires, papas et mamans, prophétisent, disent le futur, donnent des remèdes spirituels de protection, rassurent beaucoup de fidèles parce que l’on leur dit de faire des sacrifices d’offrande, de dîmes, l’on invente des auteurs des accidents bien préparés entre le 20 et le 31 décembre. C’est une atmosphère qui n’est pas différente des consultations chez les charlatans dans nos villages.

L’attitude du Catholique africain

Dans l’Église, avec l’avènement des groupes charismatiques et les communautés nouvelles de tendance charismatique issus des mouvements charismatiques (Réveil-Pentecôtistes et protestants), en Afrique, beaucoup de responsables de ces groupes et même des pasteurs ont repris le langage, les pratiques et le vocabulaire des communautés pentecôtistes pour mettre en place une spiritualité de fin d’année et de Nouvel An. Nous avons dans beaucoup de communautés nouvelles et groupes charismatiques, des dîmes et offrandes sacrificielles, des offrandes de purification annuelle, des dîmes aux parents spirituels (Le couple du modérateur ou du berger), les dîmes Gabaon, Jéricho pour ouvrir l’année, pour couvrir spirituellement les familles, pour demander des onctions d’enfantement et même des dîmes de renouvellement d’onction. Les thèmes des retraites et des évangélisations en décembre et janvier tournent autour des accidents, de la sorcellerie, de la protection, de descente de grâces suspendues et d’entrée dans la destinée. Tout ce langage non catholique ne cadre pas avec la liturgie de l’Église et sa doctrine.
La liturgie de l’Église catholique centrée sur le Christ qui vient en Noël, n’est pas reprise dans ces groupes dits catholiques. Au moment où l’Église universelle parle du Christ qui vient, du temps de l’Avent, les groupes et communautés enseignent autres choses. Le mystère de l’incarnation ne les intéresse pas parce qu’on ne parle pas d’accidents, de visions de fin d’année et de sacrifices de protection.

Que retenir ?

La liturgie de l’Église catholique nous offre des moments de spiritualité, c’est le cas du temps de l’avent. Tout catholique est invité à profiter spirituellement de ces moments pour bénéficier des grâces. La spiritualité dans l’Église catholique n’est pas du charlatanisme ni du fétichisme, ce n’est pas de la magie. La spiritualité dans l’Église catholique forme, aide, soutient, comble de grâces si l’on vit selon l’enseignement de l’Église fondé sur la Bible. Dans l’Église catholique, la fin d’année n’est pas un lieu d’escroquerie et de fausses prophéties.

Dans l’Église catholique, décembre est comme tous les mois. L’évènement qui rend ce mois particulier est la fête de la Noël et non la fin d’année. Dans l’Église catholique on ne lit pas l’avenir mais on confie l’avenir à Dieu. Il n’y a pas une spiritualité d’ouverture des cieux, il n’y a pas une spiritualité de clé d’ouverture de l’année. Celui qui reste dans la prière durant les quatre semaines du temps de l’Avent, le Christ naîtra dans son cœur, dans sa famille. C’est avec le Christ qu’il entrera sereinement dans la nouvelle année et qu’il cheminera durant les 365 jours de l’an. Chers catholiques, soyez tranquilles en décembre, vivez votre temps de l’Avent, fixez-vous sur le Christ qui vient, c’est lui qui est le maître du temps et de l’histoire.

1-Notez qu’il n’y a rien de mystérieux et de mystique spirituellement dans le passage de décembre au 1er janvier. La fin d’année du chrétien catholique, c’est le dimanche du Christ Roi. Il y a plusieurs peuples qui n’ont pas le même calendrier que nous, ce qui fait que le 31 décembre ne leur dit absolument rien. Nous avons le calendrier grégorien, il y a le calendrier Maya et autres. Ne tombez pas dans une sacralisation des mois et des jours comme font les membres des sectes ésotériques et nos traditions.

2-Dans le mois de décembre, c’est l’inculturation de la Nativité de notre Seigneur qui est important, c’est la Noël qui est importante.

3-Sortez de la mentalité de fin d’année comme temps de déchaînement de Satan, moment de sacrifices et de libération des âmes.

4-Que chacun soit serein parce que l’Emmanuel est né en Noël, il est avec nous et c’est avec Lui qu’on traversera tout. N’oubliez jamais cette parole du Christ, l’Emmanuel : « Je suis avec vous jusqu’à la fin des temps ». Quel sorcier qui pourra contredire cette parole du Christ si nous vivons simplement notre foi, si nous nous préparons vraiment à accueillir Jésus en Noël au lieu de laisser Satan nous distraire dans les fausses prophéties de décembre ?

Et le Fils des lianes de Yaobou, le Katakyé, passa son chemin

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Père Marius Hervé Djadji
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